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14/05/2023
À quand remonte cette passion ? Elle a commencé par la lecture. J’avais huit ans lorsque j’ai reçu en cadeau un livre : Où est-ce ? Un voyage autour du monde. Ce livre est toujours dans ma bibliothèque, il porte les stigmates du nombre de fois où il a été consulté : la tranche est partie en lambeaux. Mais la couverture est presque intacte, avec son fond orange, typique des années 70. Cent quatre-vingts pages illustrées de dessins de lieux, trois sites remarquables par page. Grâce à ce livre, j’ai voyagé sur tous les continents des pyramides de Gizeh à la grande muraille de Chine.
Plus tard, le rêve a pris forme, engloutissant au passage mes quelques économies d’étudiante, puis une partie conséquente de mon budget de jeune femme active. Je ne partais jamais sans un petit carnet qui me permettait de noter toutes les péripéties du voyage, les rencontres, les émerveillements, les couleurs, les bruits et les odeurs, les drôles de bestioles (parfois côtoyées contre mon gré)… Pendant le voyage, je partageais ces émotions en adressant des cartes postales à mes proches… Au retour, le voyage m’habitait encore lorsque je confectionnais mes albums photos.
J’y vois désormais un signe avant-coureur de ce qui est devenu mon métier : biographe. En effet, retracer dans un livre un récit de voyage prend tout son sens dans mon activité de passeur de mémoire. L’idée naît d’abord d’une envie de fixer des images et des souvenirs, pour la postérité. Ensuite s’ajoute le besoin de raconter des situations vécues — parfois cocasses — et de revivre des moments d’exception. Puis vient le temps de relater les moments de partage et les échanges, rendus possibles par les rencontres faites sur les chemins du monde.
Le voyage, même s’il n’est pas lointain, est toujours une découverte. C’est se confronter à un environnement différent, à une culture et un patrimoine qui nous sont étrangers, à une gastronomie dont parfois, les épices et les saveurs nous intriguent ; c’est aller à la rencontre des traditions populaires perpétuées depuis des générations. Le voyage fait appel à tous nos sens et, par-dessus tout, il vient assouvir notre curiosité.
Comment ne pas être émus par le spectacle des crémations à Bénarès, éblouis par un coucher de soleil sur le rocher d’Uluru, sidérés en accédant au site du Machu Picchu ? S’avancer vers le Grand Canyon et le découvrir soudain à nos pieds, immense, profond et majestueux ; ou encore, se perdre dans la mégalopole tokyoïte et découvrir au détour d’une rue, un parc aux sentiers moussus ou un temple couvert d’or. Autant d’émotions vécues que le récit de voyage permet de partager.
Lorsque j’accompagne des narrateurs voyageurs dans leur récit, je m’envole avec eux, je vis leur voyage, je suis curieuse de leurs rencontres, de leurs ressentis, des personnages qu’ils ont croisés, bref, des anecdotes qu’ils me confient. Ils ont souvent les yeux qui brillent à l’évocation de leurs souvenirs, signe qu’il s’agit là de moments qui les ont marqués. Souvent des photos accompagnent ces souvenirs et c’est encore mieux : elles ravivent la mémoire et font remonter à la surface, des anecdotes qui régaleront le lecteur.
Oui, le récit de voyage est un formidable récit de vie, de ceux que l’on n’oublie jamais, de ceux qui font rêver, et donnent envie de repartir !
16/04/2023
27/02/2023
Dis maman, comment c’était quand j’étais dans ton ventre ? Et quand j’étais un bébé ? À quel âge j’ai fait mes premiers pas ? Tu te souviens de cette photo où l’on est tous les deux, c’était où ?
Qui a la chance d’être maman (oui, je suis de celles qui considèrent cela comme un bonheur) a forcément entendu l’une ou l’autre de ces questions, posée des années après par un chérubin qui pèse désormais quatre-vingts kilos. Si certains souvenirs sont gravés dans notre mémoire, d’autres, plus nombreux, ont fini par s’effacer… parce que les années sont passées par là.
Pourquoi ne pas prendre le temps de se poser une ou deux heures pour lui raconter notre grossesse et les premières années de sa vie ? Parce que c’est un moment exceptionnel dans une vie… même s’il ne nous a pas toujours laissé que de bons souvenirs ! Et quand bien même il y aurait des souvenirs difficiles, voire douloureux, n’est-ce pas l’occasion de déposer sur le papier ce fardeau ?
Alors, on y va, on prend une grande bouffée d’émotion ?
Concevoir la vie n’est pas chose facile, il y a des embûches, des grossesses qui tardent à venir, d’autres qui se passent mal. Certaines sont amputées de quelques semaines et le bébé arrive sans crier gare. D’autres encore débouchent sur le deuil d’une vie qui ne faisait que commencer. Et puis, il y a celles où tout se passe à merveille… oui, oui, il y en a !
C’est beau de raconter l’attente, à commencer par la première d’entre elles : fille ou garçon ? On veut savoir ou en s’en fout. Puis les premiers mouvements : « Viens vite, il a bougé, mets ta main sur mon ventre. Là, oui, là ! » quelle joie de pouvoir enfin partager ces moments uniques avec l’autre parent. Les interactions se font ensuite plus nombreuses, on suit un petit pied qui se déplace dans un ventre désormais bien rebondi, un autre appuie là où ça fait mal. « Mais qu’est-ce qui se passe : oh ! il a le hoquet ! » Arrivent les questions : « Est-ce que mon bébé reconnaît ma voix ? Je vais lui faire écouter mon chanteur préféré, à moins qu’un air d’opéra… Comme ça, il sera mélomane plus tard, c’est sûr. » « Qu’est-ce qu’il ou elle préfère : les lasagnes ou les crêpes ? »
S’en suit la prise de tête : le choix du prénom ! Si c’est une fille, ce sera Eglantine et si c’est un garçon Hector. On est d’accord, tant mieux ! Mais ça, c’est rare … « Ah non, tu ne vas pas l’appeler comme ton grand-père Alphonse ! » « Non, pas Prudence, cela va la freiner dans tout ce qu’elle entreprendra. » Alors, on fait des compromis, en espérant ne pas les regretter un jour. Ou on attend le dernier jour… et on demande à la sage-femme : « Et vous, vous appelez comment ? »
Petit à petit, approche l’heure de la naissance. On va souffrir, c’est sûr, mais ça en vaut la peine. « Ça risque d’être long, c’est le premier ! » « Une césarienne, ah non pas question ! Mais si madame ! » A-t-on quelqu’un pour nous tenir la main ? Pour la serrer quand arrive le moment crucial ? Et là, on guette le premier cri, petit couinement de mécontentement : « Qui ose me déranger dans mon nid douillet ? », première confrontation avec la vie. Et on se découvre l’un et l’autre, ébahis. « Je t’ai imaginé pendant neuf mois… et te voilà, waouh ! » « Moi, j’ai été capable de créer ce petit être que je serre contre moi. C’est magnifique ! » Ou encore, la déception, qui ne dure jamais très longtemps : « Qu’est-ce que c’est que ce petit machin tout rouge et tout fripé ? »
Après le tsunami d’émotions arrive le tsunami tout court : on rentre à la maison, on grappille des demi-heures de sommeil, on change une couche, dix couches, cent couches. On donne des bains, on joue avec l’eau, on fait pouët-pouët avec le canard. On se couche en se disant que cette fois, c’est bon, le bébé va dormir six heures d’affilée et il se réveille au bout de deux. On donne la tétée, le bib, la totote, un quignon de pain. Il fait ses dents, elle est malade, il pleure, elle hurle, il sourit, elle rit aux éclats, il dit son premier mot (maman forcément !), elle marche à quatre pattes, il se met debout, elle tombe, il se relève, elle a fait son premier pas !!!!
Oui, c’est ce tourbillon d’émotions que l’on raconte dans un récit de naissance : les joies, les peines, les fous rires, les moments de tendresse, les petites bêtises, les premiers mots… Qu’il soit écrit en solo ou conçu à deux, c’est un vrai cadeau pour l’enfant qui le reçoit, le plus beau des témoignages d’amour tout simplement.
30/01/2023
Au fil des épisodes de ma série d’articles de blog consacrés à la biographie : « Parlons biographie : Pourquoi a-t-on besoin de raconter son histoire ? », j’ai partagé avec vous ma conception de la biographie en faisant appel à une métaphore. Et si la biographie était une recette de cuisine ?
Si le point de départ de la recette est de recueillir la mémoire, grâce à la parole du narrateur et à l’écriture du biographe, la question du besoin se pose assez rapidement. Quel est le besoin ou plutôt quelles sont les familles de besoins, qui amènent à vouloir se raconter ? J’en ai identifié six, chacune ayant fait l’objet d’un épisode de ce blog :
- Laisser une trace de son passage,
- Transmettre son histoire familiale,
- Témoigner,
- Servir d’exemple à ses proches,
- Se libérer de ses traumatismes,
- Aider les autres.
Parce que sans envie, il n’y a tout simplement pas de biographie. On ne force pas quelqu’un à écrire sa biographie, cela relève avant tout d’une démarche volontaire et choisie. Et ce choix n’est pas dénué d’efforts à consentir, pour arriver à l’objectif final : écrire sur sa vie.
Pour se lancer dans un projet de récit de vie, il faut en effet avoir l’envie chevillée au corps : regarder en arrière, se replonger dans le passé, revivre une époque révolue. L’envie de faire ressurgir des souvenirs heureux ou malheureux, de renouer avec des moments de grâce et avec d’autres que l’on aurait mieux aimé oublier.
Elle arrive sans crier gare au détour d’une page d’un vieil album photos, lorsque nous assaillent des visages, des noms, des lieux et toutes les émotions dont ils sont chargés.
Elle surgit à notre oreille à l’écoute d’une mélodie que l’on croyait oubliée, d’une chanson de sa jeunesse, du tube de ses années lycée, qui nous submergent sous une vague de nostalgie ou de gaieté.
Elle prend parfois la forme d’un bon petit plat qui réveille nos papilles, au souvenir des recettes dont nous régalait maman.
Parfois, elle vient flatter nos narines des délicieuses effluves de cuisson qui nous rappellent notre gâteau d’enfance.
On la retrouve enfin par hasard, lorsque nos doigts se réveillent au doux toucher d’une étoffe ou d’un meuble de famille.
La biographie nous emporte donc, nos cinq sens en éveil, elle nous transporte au cœur de nos souvenirs, elle nous apporte la possibilité de revivre en pensée de courts instants de vie.
Alors, ne vous demandez pas si votre vie est assez "intéressante" pour la raconter... Demandez-vous simplement si vous en avez besoin, et surtout, si vous en avez envie !
27/12/2022
Nous avons observé dans les derniers épisodes de mon blog dédié à l’écriture biographique, que le récit de vie permet de se libérer de ses traumatismes, en les couchant sur le papier. Il a été souligné que le plus souvent cette démarche n’avait pas vocation à être partagée, l’écrit ayant alors une visée « thérapeutique ».
Mais il arrive également que le fait de raconter comment une épreuve a été surmontée puisse aider les autres. En effet, en partageant une expérience personnelle douloureuse et surtout en montrant la façon dont nous avons réussi à nous en relever, nous pouvons apporter une aide à ceux qui sont confrontés à des situations similaires. C’est bien de résilience dont il s’agit, comme l’évoquait FW Nietzsche : « Ce qui ne me tue pas me rend plus fort. » En surmontant les difficultés auxquelles j’ai été confronté, j’atteste ainsi de ma propre force.
Témoigner de cette histoire personnelle, c’est alors véhiculer un formidable message d’espoir aux lecteurs. J’ai souffert, je m’en suis sorti, je raconte pour vous montrer que c’est possible et que je suis là aujourd’hui, pour le dire.
La liste des traumatismes est longue : combattre la maladie, faire le deuil d’un enfant, accompagner un parent atteint d’une maladie invalidante, élever un enfant handicapé, se relever d’un burn-out... Autant de chocs émotionnels ou physiques devant lesquels nous nous sentons très seuls lorsque nous y sommes confrontés. Et pourtant… d’autres que nous sont forcément passés par là, d’autres que nous ont vécu une situation douloureuse identique. Leur témoignage, qui met des mots sur ce que l’on ressent, peut aider à surmonter l’épreuve subie.
J’ai ainsi dans mon entourage une jeune femme qui a été atteinte d’un cancer à quarante ans. Lorsque le diagnostic est tombé, très brutalement, Camille a d’abord sombré un temps dans le désespoir. Mais c’est une battante, une vraie force de la nature et elle a vite repris le dessus. Elle ne s’est quasiment jamais arrêtée de travailler pendant son traitement. Pourtant, c’est un vrai parcours du combattant qui l’attendait. Choisir le meilleur hôpital pour se faire soigner ; trouver une belle perruque ; se renseigner sur les thérapies douces permettant de soulager certains effets secondaires des traitements… Elle ne savait pas vers qui se tourner pour obtenir des informations fiables face à ses multiples questions sans réponse. Elle a parfois dû remuer ciel et terre pour aller chercher les bonnes réponses.
Alors, lorsqu‘elle a été guérie, elle a voulu raconter son cheminement, sans rien omettre de ce qu’elle avait vécu pendant plus d’un an. Son objectif était d’aider celles et ceux qui se trouvaient dans la même situation : les informer, les guider, leur donner des conseils pratiques et surtout les rassurer… Le récit de son combat contre la maladie a permis d’aider beaucoup de femmes et d'hommes. Et aujourd’hui encore, plus de dix ans après, elle ne manque jamais d’aller voir les malades lorsqu’elle se rend à l’hôpital pour des visites de contrôle. Ce qu’elle apporte avec elle n’a pas de prix : c’est le symbole de la guérison et surtout de l’espoir.
La biographie pour être utile
Certes, se lancer dans un tel récit de vie demande du courage et de l’abnégation, cela oblige à repasser par toutes les étapes difficiles que l’on a vécues. Mais lorsque l’on écrit, non seulement pour soi, mais aussi pour les autres, l’objectif est tellement puissant et noble, qu’il permet de passer outre les obstacles. Savoir que son expérience personnelle va servir à d’autres, c’est gratifiant, cela permet de se sentir utile et de pouvoir simplement se dire :
« Je n’ai pas vécu tout cela pour rien ! »