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21/06/2023
De l'exercice du persona en biographie...
Qui sont les clients du biographe ?
Lorsque j’ai démarré mon activité de biographe, je me suis pliée à l’exercice que doit réaliser tout entrepreneur qui se respecte : définir son client cible. En marketing, cela s’appelle le persona. L’exercice est poussé : le persona doit ressembler en tout point à une vraie personne. Aussi faut-il lui donner un prénom, imaginer son histoire, ses goûts, ses activités, ses freins, ses préférences lorsqu’il se renseigne ou cherche à acquérir un bien ou un service… Il me fallait tout connaître de lui.
Premier Persona
Il y a dix-huit mois, j’avais imaginé une dame âgée d’environ quatre-vingts-ans, qui avait été active toute sa vie, aimant lire, raconter son histoire, voyager, rencontrer des amis… Mon persona s’appelait Louise.
Second Persona
Un an et demi plus tard, boum patatras, je déclare que je m’étais complètement fourvoyée. À vrai dire, cela fait déjà quelque temps que je l’ai compris. C’est pourquoi j’ai créé un second persona, Nathalie. Le constat est le suivant : celui qui va trouver un biographe est, dans la majorité des cas, un enfant souhaitant que l’un de ses parents raconte son histoire. Pour être même plus précis, c’est le plus souvent la fille du narrateur qui entreprend cette démarche. Mon persona, s’il est bien de sexe féminin, a donc rajeuni de vingt à trente ans.
Je m’interroge alors : pourquoi les femmes seraient-elles plus demandeuses que les hommes de connaître l’histoire de leurs parents ? Sans doute est-ce simplement parce que dans les faits, les filles sont plus nombreuses que les fils à s’occuper d’un père ou d’une mère âgée. Pour autant, les motivations des unes et des autres me paraissent semblables. Je vais tenter ici de les exposer, grâce à l’expérience acquise dans ma pratique de biographe. Bien sûr, chaque cas est unique, mais des points de convergence existent.
Quelles sont les motivations pour proposer à son parent d'écrire son récit de vie ?
Lorsqu’un parent prend de l’âge, les enfants — souvent ceux qui sont les plus proches géographiquement — sont en règle générale en première ligne pour l’aider dans son quotidien, ses démarches, sa santé, son maintien à domicile. Ils s’inscrivent ainsi dans une sorte de jeu de miroir : « Maman/Papa, tu t’es occupé(e) de moi lorsque j’étais enfant, maintenant, c’est à mon tour de prendre soin de toi. » Le point de bascule est souvent la perte du conjoint, qui vient renforcer l’isolement du parent survivant — les enfants assurent alors une présence plus régulière. Ils sont à l’écoute et de fait, deviennent les réceptacles de souvenirs maintes et maintes fois répétés. De là à souhaiter que ceux-ci ne se perdent pas, il n’y a qu’un pas !
L’idée de conserver ce patrimoine familial afin de le transmettre commence alors à germer, afin de ne pas être le seul dépositaire et gardien de ces trésors. De surcroît, voir vieillir son ascendant s’accompagne également de la crainte de perdre, en même temps que lui, une partie de son histoire. Or, il n’est pas rare que les souvenirs racontés s’inscrivent dans la grande Histoire : la Seconde Guerre mondiale, la guerre d’Algérie, les évolutions de la société à la suite de mai 68… Le XXe siècle est émaillé de périodes charnières qu’il est important de raconter aux générations à venir.
Autre objectif poursuivi en s’engageant dans un projet de récit de vie : faire plaisir à son parent, le distraire et lui permettre d’occuper une partie de son temps libre — souvent important dans un agenda moins rempli en sorties et activités diverses. Je constate toujours que c’est avec un immense plaisir que les seniors se replongent dans leurs souvenirs : ils me l’affirment à chaque fois. Ces voyages vers le passé les transportent dans leur jeunesse, parfois avec nostalgie, toujours avec émotion. Bref, le travail qui se fait autour de la biographie leur fait du bien !
Les vertus de la biogrpahie
Proposer ce projet de biographie à son parent âgé a plusieurs vertus. Cela permet de faire le lien entre les générations : dans son récit de vie, le narrateur s’adresse souvent à ses petits-enfants voire à ses arrière-petits-enfants. C’est également l’occasion rêvée pour lui de parler de ses racines et d’inscrire son histoire dans une lignée. Enfin cela lui permet de passer le témoin à sa descendance, pour raconter la suite.
C’est là que le métier de biographe trouve tout son sens : être un « passeur d’histoires ».